William
« On ne meurt pas d’épilepsie ». C’est ce qu’on nous avait dit quand William est mort à la suite d’une crise en 1988. William avait eu sa première crise à l’âge de 17 ans et demi et la dernière à l’âge de 22 ans. Entre temps il avait réussi à obtenir quatre « A levels », une place à l’université d’Oxford, une licence en Anglais et il prévoyait de devenir professeur.
L’argent donné par les amis et la famille fut confié à l’association qui s’appelait alors British Epilepsy Association, aujourd’hui Epilepsy Action, dans le but de publier une brochure. Au cours des années qui suivirent nous avons pu collecter encore plus de dons et nous avons publié Epilepsy and the Young Adult (L’épilepsie chez le jeune adulte), qui est encore disponible aujourd’hui.
En 1994 le journal The Guardian publia un article consacré à un garçon qui s’appelait Matthew. Il fallut se donner du courage pour le lire. Pour la première fois je réalisais qu’il y avait d’autres morts comme celle de William. Mais, grâce à cet article, je pus rencontrer la mère de Matthew, Catherine Brookes; Jane Hanna, qui venait de perdre son compagnon Alan, la mère de celui-ci; et Sue Kelk dont la fille Natalie était également décédée. Ensemble nous avons fondé en 1996 une œuvre de bienfaisance Epilepsy Bereaved (Epilepsie, le deuil). A cette époque nous avions été en contact avec une soixantaine d’autres familles.
Le but de cette œuvre de bienfaisance, à l’époque comme aujourd’hui encore, est de consoler et d’informer les familles qui ont connu un décès de cette nature et d’offrir aux familles en deuil l’occasion de se rencontrer. Notre association commença à sensibiliser le public au Royaume Uni et dans le reste du monde. De même elle encourage et aide à financer la recherche sur la mort subite d’origine inexpliquée dans l’épilepsie.
Notre premier grand succès, grâce au concours des Docteurs Stephen Brown et Lina Nashef, fut d’organiser le premier séminaire international dans le monde médical sur la
mort subite d’origine inexpliquée dans l’épilepsie, avec trente intervenants et soixante-dix participants venus du monde entier. Ce fut au cours de ce séminaire que fut définie
la mort subite d’origine inexpliquée dans l’épilepsie (SUDEP).
Notre deuxième grand succès fut de recevoir une subvention pour lancer le premier programme d’audits cliniques sur l’épilepsie (national sentinel clinical audit of epilepsy-related death). Publié en 2002, le rapport démontra que dans le Royaume Uni environ 1000 personnes par an mourait d’épilepsie, dont 500 morts subites d’origine inexpliquée dans l’épilepsie. Le rapport démontrait également que, potentiellement, 42% de ces morts subites pouvaient être évitées. A présent les données révèlent qu’en moyenne trois personnes meurent par jour d’épilepsie dans le Royaume Uni.
Nous eûmes, et avons encore, beaucoup de difficultés à persuader les autres associations sur l’épilepsie et même certains professionnels de parler du risque de mort subite, même s’il est infime. Néanmoins, en 15 ans, notre association est passé d’une petite œuvre de bienfaisance avec un employé à temps partiel à une organisation de niveau mondial, qui s’occupe de presque mille familles.
On peut mourir d’une crise d’épilepsie, maintenant nous le savons. J’aurais aimé le savoir quand William est mort, car la possibilité de parler aux autres familles qui avaient souffert la même douleur aurait été une source de réconfort.
Jennifer Preston
Global Conversation 2011